En même temps quelle réfléchit à ses rivières nos vies, nos pensées, leau avance. Le temps avance. Vers lembouchure finale. Chaque fois individuelle, chaque fois renouvelée. La réflexion se fait toujours en allant, en marchant. Cest pourquoi le poème est ici « parlé marché ». Pourquoi il dialogue avec limmobilité de la peinture (Rembrandt, Rubens, Mondrian, de Kooning, van Eyck, Spilliaert, Ensor etc
). Pourquoi il bouscule la philosophie (Descartes, Husserl, Heidegger). Pourquoi il marche joyeusement à travers la barrière des langues (Bruxelles, la Flandre). Pourquoi il réfléchit à lEurope daujourdhui, belle abstraction sans corps réel. Sans corps sensuel. Pourquoi enfin il se réjouit du goût des nourritures (les huîtres, les moules, la bière, le pain dépice). Ici le poème réfléchit à la réflexion. Au réfléchissement et au mouvement qui nous emporte vers le large. Quel large ? Cest à venir. À deviner. À devenir.
Jacques Darras compose depuis 1988 un long poème en 8 chants, La Maye, dont il donne aujourdhui le septième. Il a par ailleurs traduit de langlais Walt Whitman, Ezra Pound, Samuel Taylor Coleridge, Malcolm Lowry, Ted Hughes, William Carlos Williams, Allen Ginsberg etc. Il a écrit des essais sur la mort, sur la mer, sur le nord et le romantisme. Parmi lesquels Nous sommes tous des romantiques allemands (Calmann-Lévy) et Nous ne sommes pas faits pour la mort (Stock). Il a reçu le prix Apollinaire et le Grand Prix de lAcadémie française pour lensemble de son travail.