Ma provence : avec l'aurore qui frémit sur
la plume du maréca persiflant dans l'herbage,
éclaire un lamier blanc au sommet du talus,
essuie d'un doigt glacé la sueur rêveuse dont
s'éclaire le front des figues, mauves filles de
la nuit, ainsi qu'une risée givrerait le mussif
étain de la mer, entre les calanques pourpres
et la noire verdeur des bois de chênes-lièges
emmêlés de pins ; ma provence, sans la mort,
avec l'essence, confite en lumière, des Anciens
que n'a pu retenir la terre trésallée et dont la
moindre plante embaume notre route ; avec
le soleil qui, le soir, se dévêt au cur des mi-
mosas, et plonge nu des plus hauts degrés de
Leucate, son image éclaboussant la nerveuse
torpeur de nos amoureuses, au point qu'elles
s'éveillent chaudes, corps aux mains du désir
roulé, pétri par l'heure aux ramiers roucou-
leurs, peau luisante et dorée comme le pain
qui sent si bon la paille, au sortir du four. (Lou Pays)